Un livre de Michel Bounan est toujours un événement pour moi. Je me rappelle L'art de Céline et son temps où il résolvait l'apparente contradiction entre le Céline auteur du Voyage au bout de la nuit et le Céline de Bagatelles pour un massacre. Et cet autre livre, qui portait ce titre incroyable La vie innomable, la vie innomable, la vie innomable, celle que l'on ne peut pas nommer, celle qui est anonyme et celle qui est ignoble.

Toujours chez l'excellent éditeur Allia, il publie aujourd'hui Logique du terrorisme dont le quatrième de couverture annonce la couleur :

La guerre menée par le terrorisme contre ses adversaires déclarés est tout à fait invraisemblable. Pour être crédible, cette histoire exigerait triplement et simultanément une excessive stupidité des terroristes, une incompétence extravagante des service policiers, et une folle irresponsabilité des médias. Cette invraisemblance est telle qu'il est impossible d'admettre que le terrorisme soit réellement ce qu'il prétend être.

Bien sûr, sa thèse n'est pas nouvelle, elle a déjà été soutenu par Debord en son temps et dans d'autres lieux. Évidemment, je ne connais pas grand chose au terrorisme et j'ai trouvé les images de ces avions s'encastrant à tour de rôle dans ces tours aux États-Unis très belles : mais je dois avouer que je n'ai pas de goût. Et forcément, comme tous le monde, je condamne fermement tous les attentats.

Mais ce qui me frappe le plus, et ce qui m'a toujours frappé, c'est cette invraisemblance que décrit Bounan aujourd'hui et qui n'est jamais interrogée, sauf sous le mode d'une pseudo-théorie du complot : comment peut-on encore croire à l'inefficacité complète de l'action terroriste par rapport aux buts affichés, au prétendu aveuglement des polices et des services secrets (à l'heure, par exemple, de ce fameux réseau Échelon), et aux explications médiatiques détaillées du moindre projet avorté ?

Heureusement que l'État est là pour nous protéger, comme je le faisais en 1995. Comme si j'avais pu empêcher quoi que ce soit. Pour qui nous prend-on ? Pour des américains ?