L'idée de métaphysique descriptive peut soulever un certain scepticisme. Comment la distinguer de ce que l'on nomme analyse, qu'elle soit philosophique, logique ou conceptuelle ? En fait, l'intention est la même ; mais la différence se trouve dans la portée et la généralité. Visant à mettre à nu les traits les plus généraux de notre structure conceptuelle, la métaphysique descriptive a besoin de présupposer beaucoup moins qu'une investigation conceptuelle plus limitée et plus partielle. De là aussi une certaine différence de méthode. Jusqu'à un certain point, la meilleure méthode en philosophie, et même la seule qui soit sûre, est l'examen minutieux de l'emploi effectif des mots. Mais les distinctions que nous pouvons faire et les liens que nous pouvons établir de cette manière ne sont pas suffisamment généraux et n'ont pas la portée nécessaire pour satisfaire pleinement aux exigences d'une compréhension métaphysique. Car lorque nous nous interrogeons sur l'emploi de telle ou telle expression, aussi révélatrices que soient nos réponses à un certain niveau, elles ont tendance à présupposer plutôt qu'à exposer les éléments généraux de structure dont le métaphysicien attend la manifestation. Cette structure qu'il recherche ne se manifeste pas aisément à la surface du langage, mais reste enfouie. Il doit abandonner son seul guide sûr lorsque ce guide ne peut le mener aussi loin qu'il le désire.

Peter Strawson, Les Individus.

Peter Strawson est mort.