Sur la mort de la librairie
26 janvier 2007
Très mauvaise défense de la librairie par Isabelle Baladine Howald, libraire à Strasbourg :
Quand les lecteurs auront acheté tous leurs livres en ligne, quand les éditeurs auront vendus tous leurs livres en ligne, délaissant allégrement et de façon peu élégante (à grand renfort de déclarations fracassantes dans la presse nous enjoignant nous libraires à nous remuer, comme si ce n'était pas ce que nous faisons toute l'année, mais ils ne viennent jamais en librairie!) tout ceux qui les ont fait vivre des dizaines d'années durant, quand les librairies seront désertées - déjà, on nous demande moins conseil, préférant suivre les prescriptions des médias plutôt que nos avis, déjà j'entendsmais on ne peut pas le lire gratuitement sur Internet ?—, il se passera ce qui se passe pour le disque.
Les disquaires ont disparu, dans un premier temps.
Dans un second temps, les disques disparaissent, on télécharge directement (voir les articles de ces derniers jours à ce sujet)
Les livres risquent de disparaître pour une bonne part, et les textes seront téléchargés.
Howald semble oublier que l'industrie du disque a depuis longtemps habitué les auditeurs en changeant régulièrement les supports de la musique : le vinyle (sous ces différentes déclinaisons, 78 tours, 45 tours, 33 tours, etc.), la cassette, le disque compact, etc. Ces changements ont modifié les façons dont nous pouvons écouter de la musique. Or, nous n'en sommes pas encore là pour le livre : les diverses tentatives pour faire évoluer notre relation aux textes se sont toutes soldées par un échec.
Plus loin, après avoir confondu l'achat de livre par correspondance et le téléchargement de textes, elle avoue sa fatigue :
Mais je me fatigue, je l'avoue.
Des étudiants analphabètes aux parents incultes, des parutions stupides, si nombreuses qu'elles empiètent dangereusement sur le temps d'accueil des clients, et de travail de fonds.
Malheureusement pour Howald, ses avis de libraire sont totalement invisibles, de sorte que ni les parents incultes, ni les étudiants analphabètes (à moins que ce ne soit l'inverse) ne pourront profiter de ses lumières.
Commentaires
La dématérialisation du livre est quand même sur la bonne voie, que ce soit du côté du papier électronique et de l'e-ink ou des écrans ultra souples.
Quoi qu'il en soit, il est certain qu'internet est en train de tuer les libraires : les grandes surfaces leur avaient déjà piqué les best-sellers maintenant, à travers le phénomène de la "longue traine", ce sont les marchés de niche qui sont attaqués : sciences humaines, littérature exigeante, littérature étrangère, etc.
La solution comme vous semblez le suggérez, et comme le propose J. Vidal cette semaine dans le Monde, consiste sans doute à rendre d'avantage "visible" la compétence spécifique des libraires en investissant à leur tour le web.... Les éditeurs indépendants s'y sont déjà mis : des sites comme lekti-ecritures peuvent servir de modèle.
Ceci dit, il y a aussi des initiatives politiques à prendre : est-ce que la loi sur le prix unique du livre par exemple n'a pas fait long feu ? (son esprit est systematiquement détourné par els librairies en lignes qui proposent sur tous les livres le rabais de 5%) Il y a bien d'autres choses à réglementer que le prix dans la chaine du livre : les frais de port, la remise éditeur, la pratique des "offices", etc.
Bonjour Perle de coco,
sur la dématérialisation, si l'offre industrielle se développe effectivement, nous sommes encore très loin de la mise en production (voir aussi L'e-paper, enfin ?. Et puis, c'est bien beau de développer des prototypes hors de coût, mais on semble oublier que beaucoup de choses devront être réglées avant de pouvoir faire la bascule : le coût de l'appareil, le coûts des textes téléchargeables, les formats de textes, l'usage possible de ces textes, la pérennité du fabricant, etc. (voir aussi ce texte de Roberto Casati).
Sur Internet, Internet ne tuera rien du tout puisqu'Internet n'existe pas : seuls des pratiques individuelles existent ! Et ces pratiques s'attaquent ou vont s'attaquer, non pas seulement à librairie, mais à toute la chaîne du livre. Pour l'instant, on en est au stade de la vente par correspondance ; de là à dire que la librairie va mourir...
Sur la visibilité, j'ai suffisamment râler sur ce carnet sur la nullité des sites Web d'éditeurs comme Vrin (et j'en profite pour signaler que la consultation en ligne du catalogue de Gallimard est, elle aussi, catastrophique) et même lorsque j'ai relayé l'appel de lekti-écriture, je ralais encore contre l'inaccessibilité du site des éditions Kargo.
L'usage, cherchez l'usage : Amazon, c'est un onglet livre, une boite de recherche, un bouton Go, des liens permanents et éventuellement des avis.