Via pcinpact, une curieuse étude publiée par Tera Consultants et Equancy&Co, intitulée « Impact économique de la copie illégale des biens numérisés en France » et sobrement sous-titré « Quand le chaos économique s’immisce dans la révolution technologique » prétend chiffrer les pertes économiques et sociales du téléchargement en mélangeant allègrement rétrospective et prospective.

Il y a en effet une contradiction entre l’introduction qui indique que (je graisse)

Quatre domaines ont été étudiés : la musique, le cinéma, la télévision, le livre. Il ressort que la copie illégale a un impact direct négatif de l’ordre de 1,2 milliard d’euros au cours de la seule dernière année (2007) sur l’activité des quatre domaines d’activité couverts, cela a induit une destruction nette de 5000 emplois directs.

et la section 6 consacrée à l’édition :

Le but de cette section n’est pas de chiffrer les effets actuels de la copie illégale dans ce domaine, mais de faire l’exercice prospectif dans la perspective d’émergence d’un phénomène de masse, à l’image de celui observé dans le domaine de la musique et de la vidéo.

De fait, les chiffres avancés ne concernent que trois domaines, ceux de l’édition étant que prospectifs.

Comment calculer ce chiffre pour l’édition ? Très simplement :

Le chiffrage de la copie illégale du livre nécessite en premier lieu l’estimation du nombre de livres numériques téléchargés illégalement et se substituant à l’achat (de livre numérique)

La conjonction est importante ici. Calculons ensemble :

  1. chaque français a acheté 7,29 livres en moyenne en 2006 ;
  2. hypothèse 1 : chaque téléchargeur potentiel de livre achètera lui aussi 7,29 livres numériques ;
  3. nombre d’internautes français : 31,57 millions ;
  4. nombre d’internautes français utilisant un réseau pair à pair : 30%, soit 9,5 millions (alors que 31,57 / 3 = 10,5) ;
  5. hypothèse 2 : 50% des internautes français utilisant un réseau pair à pair sont des téléchargeurs potentiels de livres, soit un peu moins de 5 millions. On remarquera la précision du pourcentage avancé ici qui ne repose sur aucune justification (pourquoi 50% ? Pourquoi pas 49% ou 51% ?) ;
  6. nombre de livres numériques achetés France : 5 millions de téléchargeurs potentiels de livres que multiplie une moyenne de 7,29 livres, nous donne 34,5 millions de livres
  7. hypothèse 3 : le taux de substitution est 50% (remarquons encore une fois la précision du chiffre !), ce qui veut dire que 50% de ces téléchargements se substitueront à l’achat d’un livre numérique ;
  8. Conclusion : une perte potentielle de vente de 17,25 millions exemplaires !

Pour calculer le chiffre d’affaire, il suffit de fixer le prix moyen d’un fichier numérique, en s’appuyant sur Amazon et le marché nord-américain (puisque ce marché est balbutiant en France), soit $9,99 par fichier numérique, -15% ce qui nous fait un prix moyen de 8,5 euros en France. Perte total : 17,25 millions d’exemplaires x 8,50 euros = 147 millions d’euros.

Consultant, un beau métier.

Mise à jour du 30.XI.2008 :

Voir aussi :