Prolongement d’une discussion estivale sur les inférences logiques avec le paradoxe de Caroll. Des deux propositions suivantes

  • (A) Des choses qui sont égales à la même chose sont égales entre elles
  • (B) Les 2 côtés de ce triangle sont des choses qui sont égales à la même chose

on doit conclure que

  • (Z) Les 2 côtés de ce triangle sont égaux entre eux

Or, c’est que la Tortue refuse d’accorder à Achille[1]. Elle est prête à accepter

  • (C) si A et B sont vrais, Z doit être vrai
  • (D) si A et B et C sont vrais, Z doit être vrai

mais elle refuse toujours d’admettre la conclusion (Z).

Comme l’écrit Pascal Engel

« peut être la Tortue veut-elle soulever un problème sceptique quant à l’application des règles logiques. En quoi le fait de reconnaître la règle du modus ponens comme une norme du raisonnement peut il être suffisant pour nous conduire à agir ? La Tortue n’est-elle pas victime d’une sorte d’akrasia inférentielle qui lui fait voir le meilleur (logiquement) mais lui fait suivre le pire ? Ou n‘est-elle pas, comme Lord Jim dans le domaine de l’action, victime d’une version cognitive de ce que les médiévaux appelaient accidie [2]? Qu’ai-je à faire de la logique, semble–t-elle dire. Comment ne pas lui donner raison ? J’ai connu un logicien, amant transi, qui s’attendait à ce que l’objet aimé effectue un modus ponens, mais était tout étonné que sa belle ne détache ni même ne contrapose. »

Quelle stratégie adopter face à ce refus de l’élève la Tortue ? C’est ce que vous pouvez découvrir dans les actes du séminaire Enseigner la philosophie, faire de la philosophie. En complément du texte précité sur la notion de démonstration (pp. 51-63), on pourra lire La rationalité des démonstrations de Pascal Ludwig (pp. 107-123).

Notes

[1] Lewis Carroll, What the Tortoise Said to Achilles, Mind, 1895.

[2] Dante, Purgatorio, XVIII, 132.(Nota : voir aussi l’entrée Acédie sur Wikipedia)