« La forme actuelle des sujets de dissertation — cette forme a beaucoup évolué depuis que le baccalauréat existe — est officiellement celle d’une « question directe, explicite et ouverte ». Cela veut dire, en principe, qu’en évitant le style de la devinette ou de l’énigme, le sujet a la forme d’une question (et non pas d’un problème : c’est-à-dire d’un énoncé comportant des données et une « problématique » ou dispositif théorique déterminant la réponse) s’énonçant en une proposition de forme interrogative, admettant une réponse nette et non induite à l’avance par la question, déterminant donc une discussion et une recherche.

Cette caractérisation semble relever du bon sens. Elle appelle cependant diverses observations : la prescription de formuler directement et explicitement une question interdit en fait de proposer des sujets demandant une définition ou une analyse, la détermination d’une notion par rapport à une autre, ou, plus simplement, relevant de la « question de cours ». Ajoutons que cette forme aboutit souvent, dans un souci de facilité, à donner un tour un peu puéril aux sujets proposés, notamment lorsqu’il est fait usage du pronom personnel je. Enfin, si l’on passe sur le fait qu’une question qui paraît claire à l’examinateur ne l’est pas nécessairement pour le candidat, il faut noter que de ces prescriptions résultent en fait des questions souvent extrêmement indéterminées. Et c’est cela qui égare quelquefois les candidats, ou les effraye : cette forme revient à exclure par principe tout guidage, précisément en excluant toute autre ébauche de consigne ou d’indication sur la manière de comprendre ou d’aborder le sujet, sur l’utilisation possible d’une culture philosophique.

Certes, l’intention de clarté et de simplicité qui conduit à formuler les sujets dans la langue commune est sans doute bonne, mais elle n’exclut pas des effets pervers. L’esprit de l’épreuve est que l’on veut vérifier la capacité du candidat à répondre à une question de philosophie et non l’étendue de sa culture ou sa maîtrise des moyens techniques de cette discipline (raison pour laquelle les sujets sont des questions et non des demandes de définitions, d’analyses, de distinctions, etc.) : s’il n’est pas interdit (et même s’il est recommandé) au candidat de maîtriser ces moyens techniques, de posséder une culture philosophique et d’en faire usage, ce n’est pas là dessus qu’on l’interroge et ce n’est pas cela qui est enseigné, du moins directement. La difficulté est que, sans ces moyens, il reste peu de choses à la plupart des candidats, ce qui explique la pauvreté de bien des copies qui traitent de sujets élevés sans quelquefois disposer des concepts les plus élémentaires. À cet égard, la maîtrise des repères est essentielle, et il faut remarquer que le programme suggère nettement d’en faire usage pour clarifier la formulation des sujets. On peut regretter cependant que l’articulation des sujets proposés et des repères possibles demeure, le plus souvent, implicite. »

État de l’enseignement de la philosophie en 2007-2008

(via Le café pédagogique)