X

 

 

    C’est la fin.

 

    Je rêvais d’éclabousser la galaxie de mon talent. En fin de compte, je vais me contenter d’éclabousser le trottoir en contrebas avec la pulpe sanguinolente qui restera de mon corps musclé d’athlète une fois ma chute achevée.

    Au moins, je me console vaguement en songeant que ça mettra un peu de couleur aux trottoirs si ternes de P-Oilad’e.

    Ce qui est fou, c’est de constater que bien que ma chute ne soit que de quatre étages, mes pensées ont le temps de s’emballer à un rythme effréné. J’ai l’impression de tomber depuis des heures.

    Aurais-je développé un pouvoir surnaturel me permettant de ralentir le temps, tel un Mage-Guerrier des temps anciens ? Ce serait ballot, là, juste avant de mourir.

 

    – Arrête le speeder, on est stabilisés, juste sous lui !

    – Hoy ! Hoy ! Très bien, hardis compagnons ! Tendez les bras pour l’attraper, ou au moins amortir sa chute. Au boulot !

    Hein ? Quoi ? Plaît-il ? Se pourrait-il que… ?

    Je m’écrase comme un sac de patates corelliennes contre des bras, des têtes et je ne sais quoi d’autre de vivant. La vache kirienne ! J’ai reçu un coup de tête dans la colonne vertébrale, ça fait un mal de chien-garou ! Mes cris de douleur se répercutent dans la bouche de mes sauveurs, dans un méli-mélo capharnaumesque (certes, ce mot n’existe pas, mais il sonne bien, il me plaît).

    – On l’a récupéré, fonce !

    Ouille ! Comme si je n’avais pas assez mal partout, il faut encore que ce type me crie dans l’oreille.

    – Hoy ! Hoy ! Hoy ! Accrochez-vous, vaillants compagnons ! lui répond une voix enjouée aux accents de conte de fée.

    Le speeder accélère brusquement et nous renverse à nouveau tous à l’arrière, tels des quilles de 3DHD-bowling. Je ne comprends rien à ce qui se passe. Mais vraiment rien !

    Je me prends un coup de pied dans la figure, de la part de mon voisin de gauche qui cherche à s’asseoir correctement, tout comme ses compagnons. Je sens ma dent qui me déchausse sous ma langue. Pfeuh… au prix que coûtent les soins dentaires…

    Toujours sous le choc, j’essaie de comprendre, d’appréhender la réalité que j’ai sous les yeux. Quoique réalité, c’est peut-être un grand mot quand je découvre ce à quoi j’ai affaire.

    Quatre personnes sont assises à l’arrière du speeder avec moi, plus un devant, aux commandes, qui slalome entre les gratte-ciel comme s’il était poursuivi par tous les diables de tous les enfers religieux connus et inconnus.

    Je me retourne pour identifier nos poursuivants. Personne. Il a dû regarder trop de films d’action 3DHD.

    Quant à moi, je me demande si je n’ai pas été exposé accidentellement à des produits psychotropes.  

 

    Les cinq personnes qui m’entourent sont toutes vêtues de couleurs criardes, avec des chaussures aux pointures démesurées. Ils portent des perruques flashys aux reflets scintillants, arborent de superbes nez rouges clignotants et ont le visage bariolé de maquillage outrancier, telle les accortes femmes qui travaillent au club privé l’Aspiratrice, dont je suis membre.

 

    Des clowns. Comme échappés du Cirque Dinper ou de chez Alhicle Zatavva.

 

    Normal.

 

    Même s’ils semblent humanoïdes au premier abord, je remarque qu’ils ont tous une queue félinoïde, ainsi que des vibrisses frémissantes au niveau des joues.

 

    Alors que j’en dévisage un depuis trop longtemps, quasi en état de choc, il me lance :

    – Miaou !