XXIX

 

 

    L’astroport de Zarc Poologik est entièrement dédié aux animaux divers et variés, ce qui est normal vu que la planète entière a fait de la transaction des animaux en tous genres sa raison de vivre.

    Il y en a partout, c’est incroyable ! Y compris au guichet de la douane, étonnamment, alors que c’est un poste stratégique où on aurait pu s’attendre à un peu plus de sérieux.     Derrière la vitre, il y a une espèce de chien qui me regarde avec méfiance, genre bouledogue, affublé d’un uniforme. Zut, si j’avais su, j’aurais amené un os à moelle.

    Je lui dis :

    – Ah ! Ah ! Super drôle, les gars ! Vous êtes cachés sous le comptoir et vous faites croire que des animaux sont des douaniers à votre place ? Ah ! Ah ! Qu’est-ce que c’est amusant ! Waouf ! Waouf ! Donne la papatte, le cabot !

    – Ça vous fait rire ? qu’il me répond froidement. Hey, les gars, on a un suspect !

    De la guitoune dans laquelle il veille, cinq êtres-chiens qui lui ressemblent comme deux gouttes d’eau sortent comme un seul homme (-chien). Chacun attrape un gant en latex, qu’ils enfilent soigneusement à leur main droite, sauf un, à la main gauche : forcément, il fallait bien qu’il y en ait un encore moins normal que les autres.

    Ils font claquer leurs gants et l’un d’eux me fait :

    – Fouille corporelle poussée. Veuillez nous suivre, monsieur.

    Ô que je n’aime pas son sourire satisfait…

    Je me tourne vers Zavid, parfaitement capable de me sortir de ce mauvais pas, je le sais. Elle se contente de me sourire narquoisement, la garce, et me dit :

    – Bon courage, Nomis. Je t’attends, t’inquiète.

    Ouaip, c’est sûr, chuis vachement pas inquiet quand j’entends ce type de commentaire… Je hais la galaxie et toutes les formes de vie bizarres qui la peuplent. Quand je dis qu’il faut éradiquer tout le monde sauf les humains, les seuls êtres normaux !

    Au bout de trois heures, je sors de la guitoune des douaniers, dans un état dont je n’ai guère envie de parler. J’ajoute Zark Poologik à la liste des planètes où les Résistants pullulent, à côté de P’oilad-e. Dès que je serai rentré à la maison, il va y avoir des articles assassins qui vont sortir sur certaines planètes peuplées d’arriérés aux velléités révolutionnaires.

    – Bon, et maintenant on fait quoi ? que je demande à Zavid, en ignorant son sourire narquois.

    – C’est toi le journaliste, démerde-toi pour trouver Kiki !

    Tss… Elle est marrante, elle. Je fais quoi, moi ? Je télécharge une application pour suivre les crottes de minougroar ?

    Bon, vu que le minougroar se vend très cher, je fais une recherche primaire sur le 3DHD-réseau. Miracle ! Un seul est annoncé en vente aujourd’hui, dans une vente aux enchères non loin d’ici. Quand je lui montre ça, Zavid a l’air plutôt contente. Et comme je vois que c’est à peu de kilomètres de notre position, je suggère un truc qui fera du bien à mes pauvres finances :

    – On y va à pied ?

    – Taxi-speeder !

    Ça, c’est ce qu’elle crie en même temps que je parle.

    J’ai le sentiment de boire le vin jusqu’à la lie, d’une bouteille où il n’y aurait que de la lie.

Le taxi-speeder nous prend une fortune pour nous déposer à la salle des ventes. Bien évidemment, au moment de payer, Zavid se tourne vers moi. Non mais oh, je suis une vache à lait beau ou quoi ? Bon, OK, je ne dis rien, mais je n’en pense pas moins.

    L’expo d’animaux se déroule dans un hall immense, genre on pourrait y parquer un destroyer stellaire. Les fortes odeurs qui y règnent et s’entrecroisent me rappellent un peu celles de mon appartement un lendemain de cuite de plusieurs jours.

    Quand les types à l’entrée nous indiquent que l’expo est payante, devinez qui se tourne vers moi ? À croire qu’elle ne sait faire que ça…

    Évidemment, je paye encore. Et évidemment, mon paiement est encore accepté. À mon retour, je suis un homme mort. Si ça se trouve, mon appartement est d’ores et déjà saisi, histoire d’éponger une goutte d’eau parmi mes dettes. Et la banque a peut-être mis ma tête à prix.

    Bientôt, tous les tueurs de la galaxie seront à mes trousses ! Même si je n’ai pas de trousses, n’étant pas un écolier.

    Bref, je verrai ça en rentrant parce que là, je dois suivre Zavid, qui entre d’un pas décidé. Ouf, pour une fois, ce n’est pas moi qui vais prendre tous les risques mais elle.

    Je la suis donc docilement, prêt à la voir tuer tout le monde, ravager tout le hall juste pour retrouver Kiki. En fait, j’ai hâte de voir Zavid exploser (pas littéralement), en explosant (littéralement) tout le monde. Voir un bon massacre me calmera les nerfs, et je me dis qu’elle doit être à bout de patience, elle aussi : après tout, ça fait longtemps qu’elle n’a pas tué quelqu’un.

    Bien évidemment, rien ne se passe comme prévu. Quand on arrive devant une cage à minougroar – je devrais dire LA cage au minougroar vu qu’il n’y en a qu’une –, l’adorable (sic) Kiki se jette sur les barreaux de sa cage en nous voyant.

    – Nomis ! me fait Zavid en me désignant la pancarte sur la cage.

    Je lis ce qu’il y a de noté : au début, je pense que le chiffre qui s’affiche en gros comptabilise le nombre de minougroars vivant dans la galaxie. Finalement, il semblerait que ce soit le prix auquel Kiki est vendu.

    Je tombe pour m’évanouir mais suis retenu par Zavid. Alors que nous sommes ainsi, dans les bras l’un de l’autre, elle au-dessus de moi, voilà qu’elle se penche vers moi et que ses lèvres se rapprochent vers les miennes…

    Avant que j’ai eu le temps de hurler, elle me glisse à l’oreille :

    – Va falloir raquer, Nomis.

 

    Ah. Je me disais, aussi…