La réforme de l'orthographe
jeudi, novembre 10 2011 | Actualités | 2 commentaires
Elle revient sur le devant de la scène ces derniers temps, avec la problématique suivante : établie en 1990, soit il y a 21 ans, elle n’a jamais été appliquée ou presque.
Personnellement, j’ai toujours été bon en orthographe, et celle que j’ai apprise est celle d’avant la réforme. Donc je fais quoi ? Je désapprends ce que j’ai appris ? La réponse est non, car la méthode ne m’intéresse pas, et qu’il me semble impossible (pas sans une bonne dose de recherches) de savoir ce qui est pris en compte par ladite réforme.
Je m’explique : quand j’écris, mon correcteur automatique (en l’occurrence word) me signale les mots mal écrits (du moins selon lui). Sauf que certains correcteurs sont réglés sur les modifications induites par la réforme et d’autres non. Donc c’est le bazar pour s’y retrouver, d’autant que le français d’avant 1990 est toujours admis. On se retrouve donc dans la situation bâtarde qui dit que plusieurs orthographes sont possibles pour un seul mot.
Certaines orthographes ont été changées, d’autres se présentent désormais sous deux formes, et les correcteurs d’ortho présents sur le Net font ce qu’ils veulent. Bref, alors qu’auparavant on avait un seul français considéré comme correct, on se retrouve désormais à en avoir plusieurs. Je trouve que c’est une situation idiote.
On nous dit que le français n’a jamais été une langue figée, qu’elle évolue, ce qui est vrai. Mais je serais simplement curieux de savoir comment se sont passées les précédentes réformes, le temps qu’il a fallu pour réellement les mettre en place. Je suis un dinosaure de l’orthographe puisque j’ai appris l’ancienne orthographe, et celle-ci me poursuivra jusqu’à ma mort. Je n’ai pas l’intention d’en changer. Seule la mise en application de cette réforme à l’école peut permettre aux nouvelles générations d’utiliser ce nouveau français, et le temps aidant, les dinosaures comme moi disparaîtront. Il y aura bien sûr des survivances, au sens où des parents maîtrisant l’orthographe pré-1990 l’inculqueront à leurs enfants, si bien que quoi qu’il arrive, et même si la réforme était enfin appliquée à partir d’aujourd’hui, il faudrait encore quelques décennies pour la voir réellement se généraliser. Or pendant ces quelques décennies, du fait de l’acceptation de plusieurs formes d’écriture pour le même mot, bien malin qui pourra parler de faute d’orthographe ou non.
Globalement, je suis contre cette réforme pour une raison toute personnelle : on nous dit qu’elle a été mise en place car le français est trop compliqué. Mais comment est-ce qu’on détermine qu’il est trop compliqué ? Parce que trop de gens font trop de fautes pour un certain nombre de mots ? Je prends un exemple fictif : disons que l’Académie française fait une recherche et estime à 80% les gens qui ne savent pas écrire le mot “nénuphar”. À partir de cette constatation, deux solutions peuvent être envisagées : soit elle met en place des mesures pour faire intégrer la bonne orthographe aux élèves, par le biais de l’Éducation Nationale, soit elle simplifie le mot pour que l’erreur commise par beaucoup de gens devienne la bonne orthographe.
C’est donc la deuxième solution qui a été préconisée, et je suis contre car c’est à mes yeux une solution de facilité. Quelque part, c’est constater que l’Éducation Nationale n’arrive pas à remplir l’une de ses missions, qui consiste à inculquer les bases du français aux élèves. Or plutôt que de lui donner les moyens de remplir sa mission, la solution retenue a été de baisser le niveau général (c’est du moins ainsi que je vois les choses).
Bref, c’est un constat d’échec. À qui la responsabilité ?
L’Académie Française est la référence en matière de français, or elle soutient la réforme, initiée par le monde politique. Sauf que les profs, qui sont le relais des institutions sur le terrain, rechignent à la mettre en place. On fait quoi, maintenant, à part avoir l’air con en se réveillant vingt ans plus tard ? Parce que quoi qu’il arrive, vingt ans d’application de la réforme ont été perdus, ce qui repousse à nouveau de quelques décennies son entrée dans les moeurs. Si la réforme n’a jamais été appliquée, ou du moins marginalement, autant l’abandonner. Elle n’est pas morte-née mais est sous respiration artificielle depuis sa naissance. Il est temps de débrancher la machine et de la laisser mourir…
Tout ceci ne représente que mon opinion personnelle, basée sur le fait que je maîtrise plutôt bien le français pré-1990. Mais j’ai bien conscience que je serais d’une arrogance certaine si j’affirmais que si moi j’ai maîtrisé ce français, les autres n’ont qu’à faire pareil. Le problème n’est pas là. Je suis minable en maths un tant soit peu élaborées (c’est-à-dire au-delà des quatre opérations et des pourcentages), et j’aurais sûrement été ravi de vivre une réforme, une simplification des maths. Mais d’un autre côté, si je ne suis pas loin de haïr les maths tellement elles me sont hermétiques, je ne leur reproche pas particulièrement d’être compliquées en elles-mêmes : si je ne les maîtrise pas, c’est clairement de ma faute (via un manque d’intérêt flagrant dès que je comprends pas du premier coup dans ce problème)… et sans doute aussi de celle des profs qui étaient chargés de me l’inculquer.
Bref, toutes les positions sont légitimes, mais il faudrait quand même que nos institutions prennent leurs responsabilités et décident d’appliquer sérieusement ou non les réformes qu’elles pondent.
Commentaires
Pendant longtemps j'ai été contre la réforme de l'orthographe. Mais, avec à présent 20 ans de métier en tant qu'instituteur, je serais plutôt pour... Quand je vois chaque année les difficultés que connaissent nombre d'élèves pour écrire correctement, ou lorsque j'essaie de leur expliquer pourquoi ici on écrit deux "t" ou deux "l" et là un seul alors que, souvent, il n'y a aucune logique orthographique sinon celle de rendre notre (belle) langue française encore plus difficile qu'elle ne l'est déjà, oui, je serais finalement pour une réforme...
Un point de vue que je peux comprendre. Les explications du type "c'est comme ça" ne sont jamais bonnes, dans la mesure où elles sont le fruit de l'habitude plutôt que d'une réflexion logique. Tant qu'à être illogique, autant l'être d'une manière plus simple, en effet.