Vivre comme Balzac
31 décembre 2010
Discussion remarquable sur tiers livre à partir de Balzac :
« Ce qui mériterait une approche révisée, c’est comment, dès la possibilité de commercialiser ses écrits – pour lui qui vitalement a besoin de vivre de sa plume (expression dont il est bien surprenant qu’elle soit devenue cliché jusqu’à nous), invente un auteur lié à la fonction précise de ces écrits, donc l’écosystème de leur dispositif de lecture (comment, quoi et où lisent les personnes qui rémunèrent leur lecture), et des formes narratives qui découlent de cette adéquation – la Cousine Bette et les textes ultimes de Balzac seront peut-être les seuls, depuis le Cromwell de 1820, à ne pas avoir cherché intentionnellement à correspondre à cette supposée demande du lectorat, même si évidemment rien n’est si schématique avec l’auteur de Louis Lambert, sinon il ne serait pas notre Balzac. »
Commentaire de Pierre Ménard citant Xavie Cazin (je graisse) :
« Comme le faisait remarquer récemment à juste titre Xavier Cazin d’Immatériel : « Sans doute faudrait-il garder à l’esprit que les fichiers ne sont qu’un pis aller de l’édition numérique. L’horizon, c’est l’œuvre Web. Il est bien sûr logique que les éditeurs proposent des fichiers pour encore quelque temps, puisque c’est la seule chose à laquelle les libraires acceptent de revendre des accès, mais le multimédia et l’enrichi, c’est sur le Web que ça se passe en priorité, où d’ailleurs ça fait longtemps qu’on ne se pose plus la question de l’encombrement, ni même de la compatibilité. » »
Karl Dubost ouvre d’autres sentiers :
« Dans les questions que je posais (qui n’ont pas forcément de réponses), je me demandais sûrement un peu naïvement quelles sont les possibilités pour les auteurs de pouvoir vivre passionnément tout en continuant leur écriture. La mythologie de l’écrivain insiste aujourd’hui sur la vente du contenu (un livre) dont la valeur (monétaire) de la possession est en cours d’explosion. Je le répète (trop souvent), on achète pour l’instant un objet physique, pas un temps de lecture. On achète le livre, on le stocke, et on le lit éventuellement. (Question soudaine qui s’intercale - Combien de livres dans les bibliothèques n’ont jamais été empruntés, ou une fois par an, une fois tous les 5 ans, etc.) La salle de cinéma est différente, on achète du temps devant un film (une expérience). Le DVD on achète un objet, même chose que le livre. Cependant le réseau distribué et connecté et la numérisation du contenu change complètement la donne. De l’acte d’acheter la propriété d’un objet, on passe aux droits d’accès à un objet, puis à un contenu uniquement. Sauf que tout droit d’accès numérique est une barrière en paille dans le torrent. L’eau coule autour. Il est impossible de vraiment le contrôler. »