Chapitre II : Au commissariat

Satisfait de ce premier contact, Kerdan Majoline reprit sa route. Son objectif apparut vite dans son champ de vision : le commissariat de quartier des Forces de Sécurité de Coruscant. Deux policiers lourdement armés gardaient l’entrée, tout en braquant des scanners portatifs en direction de tous les passants et véhicules se dirigeant vers eux. Dans ce genre de quartier, mieux valait pouvoir détecter à temps les dangers, surtout quand on appartenait aux forces de l’ordre : c’était ni plus ni moins une question de vie ou de mort.
Kerdan subit cette inquisition à distance avec détachement. Il se savait blanc comme neige. Mais comme il marchait droit vers les deux policiers, ces derniers crispèrent leurs doigts sur la détente des blasters-mitrailleurs qu’ils portaient en bandoulière.
– Bien le bonjour, messieurs, fit Kerdan. Pourrais-je entrer, je vous prie ?
Après l’avoir jaugé en silence, les deux gardes lui firent signe de passer.

Kerdan se retrouva dans un sas sécurisé comptant deux portes en transparacier, outre celle qu’il venait de franchir. La première menait à la partie publique du commissariat, celle où les victimes comme les délinquants défilaient jour et nuit. Le comptoir derrière lequel plusieurs policiers officiaient était pris d’assaut par une foule bigarrée de plaignants de tous âges et de toutes espèces. Derrière la deuxième porte, une atmosphère bien plus calme se dessinait, sous forme de boxes occupés par des fonctionnaires des FSC en plein travail, concentrés sur leurs consoles informatiques.
Seul le personnel autorisé pouvait franchir cette deuxième porte. Voilà qui tombait bien, Kerdan n’était pas le premier quidam venu et ne souhaitait pas perdre plus de temps qu’il n’en était nécessaire. Plus vite il se serait acquitté de sa tâche, plus vite il pourrait retourner à ses activités habituelles.
Il sortit une identoplaque de son portefeuille et la fit passer devant le scanner contrôlant l’ouverture de la porte. Celle-ci s’ouvrit dans un chuintement discret. Kerdan Majoline entra.

Les murs de la vaste pièce sans fenêtres étaient embellis par des holos de paysages enchanteurs, et se divisait en quinze boxes dont les murets de séparation n’excédaient pas un mètre cinquante. Presque tous étaient occupés par des policiers.
De l’autre côté de la pièce, des holos-panneaux surmontant deux entrées de couloirs indiquaient où se trouvaient les différents services, bureaux et fonctionnaires des FSC. Il eut tôt fait de trouver la localisation du bureau qui l’intéressait, et en prit la direction.
Kerdan salua de la tête le secrétaire de l’homme qu’il venait rencontrer. L’employé ouvrit la bouche, avant de la refermer sans avoir prononcé un mot. Kerdan rajusta sa cravate devant la porte du bureau, avant de la franchir.

L’humain assis à son bureau était gras et dégarni. Il transpirait à grosses gouttes, malgré sa chemise largement ouverte sur son torse velu. Il martelait tant sa console informatique que Kerdan se demanda ce qu’elle avait bien pu lui faire pour mériter une telle vengeance.
Quand Kerdan se racla la gorge pour signaler sa présence, l’humain sursauta et bondit de son fauteuil, avant de s’attaquer bille en tête à son visiteur impromptu :
– Espèce de crétin, ça vous amuse de faire peur aux gens comme ça ? Et puis comment vous êtes entré ? C’est bien la peine qu’on me colle un secrétaire si ce fils de Hutt laisse passer n’importe qui ! Heureusement qu’il est payé pour filtrer mes visites ! Vous êtes qui, d’abord ?
Kerdan se retint de sourire en écoutant la diatribe de l’homme. Quand il eut enfin la parole, il tendit la main à l’humain :
– Bien le bonjour, capitaine. Je m’appelle Kerdan Majoline, et j’ose espérer que vous avez été mis au courant de ma visite.
Le capitaine des FSC écarquilla les yeux de surprise :
– Si je m’attendais… Vous ne ressemblez pas du tout à vos pairs. C’est un honneur de rencontrer un…
– À vrai dire, l’interrompit Kerdan, je suis ici à titre privé. Ma hiérarchie n’est pas au courant de ma présence.
– Que voulez-vous dire ? demanda l’humain, méfiant.
– Je suis ici suite à un appel à l’aide de certains habitants, et suite à l’agression qui a eu lieu il y a trois jours.
– L’agression ? Vous plaisantez ?
– Pas le moins du monde, capitaine. Vous en avez entendu parler ?
– Ce n’est pas ce que je veux dire, messire Majoline. De quelle agression parlez-vous ? Il y a trois jours, il y a eu… voyons voir ça…
Le capitaine se pencha sur sa console et appuya sur quelques touches, comme s’il voulait les enfoncer profondément dans le clavier.
– J’y suis ! Il y a onze agressions il y a trois jours. De laquelle s’agit-il ?
Onze ? La situation était pire que Kerdan l’avait imaginé.
– En fait, peu importe, répondit-il. Suite à cet événement, j’ai décidé de vous aider à arracher ce quartier aux gangs.
Le capitaine éclata de rire et mit longtemps à se calmer, sous le regard impassible de Kerdan.
– Je savais que les gens comme vous vivaient dans leur petit monde, mais là, vous y allez fort ! Vous êtes tout seul et vous voulez lutter contre trois gangs ? Soyons sérieux ! Revenez avec une armée et vous pourrez avoir un minimum d’efficacité ! Et encore, il vous faudra protéger longtemps vos arrières, les gangs sont rancuniers !
– Je suis très sérieux, capitaine, rétorqua froidement Kerdan. Effectivement, je suis seul. Et mon temps est compté : je quitte le quartier dans quatre jours.
– Quatre… ? Vous voulez vous débarrasser des gangs en quatre jours ? C’est impossible !
– Il faudra pourtant que ça le devienne, capitaine. J’ai d’autres engagements à honorer ensuite, et ils concernent la paix de tout un secteur galactique.
– De quoi avez-vous besoin ? demanda le capitaine sur un ton dubitatif.
– D’une ligne directe avec vous, au cas où des mesures d’urgence devaient être prises.
– Quel genre de mesures d’urgences ?
– Je l’ignore, capitaine. J’envisage juste le pire.
– Le pire serait que le quartier tout entier subisse les effets d’une guerre des gangs ! Les morts se compteraient par centaines !
– Il n’y en aura aucun, assura Kerdan, péremptoire. Ni parmi les habitants, ni parmi les membres des gangs.
– Et comment comptez-vous vous y prendre ?
– Je vais reprendre à mon compte plusieurs méthodes qui ont fait leurs preuves par le passé. Mais je ne saurais vous en dire plus pour l’heure : j’ignore lesquelles me seront nécessaires.
– Et finalement, je ne suis même pas sûr d’avoir envie de les entendre, bougonna le capitaine. Bon, agissez à votre guise, vous avez mon soutien… au moins tacite. Par contre, si la situation dégénère et que le quartier devient le théâtre d’une guerre ouverte entre les gangs, soyez certain que je demanderai votre tête à vos supérieurs !
– Vous n’aurez pas à le faire, capitaine.je vous remercie de votre écoute et vous souhaite une agréable fin de journée, répondit poliment Kerdan avant de prendre congé de son hôte.
Dès qu’il fut sorti, le capitaine cogna de nouveau sa console.
Agressions… Il y a trois jours… Voyons les dossiers… Pas celui-là… Ici, je ne vois pas… Rien d’intéressant là non plus… Mais que… ? Bon sang, c’était donc ça !

« Dossier AZ-412-IK256. Agression physique à l’arme blanche, ayant entraîné la mort. Nom de la victime : Évanie Majoline. »