Elle arrive
mardi, novembre 6 2012 | Nouvelles | 2 commentaires
Une petite nouvelle sans la moindre prétention portant sur un quiproquo inspiré de l’actualité récente…
Comme souvent pour mes nouvelles, la chute m’est d’abord venue à l’esprit. Ne restait ensuite plus qu’à broder autour…
Elle arrive
Ils m’inspirent de la pitié, tous autant qu’ils sont. Beaucoup ont fui, parfois même sans prendre le temps d’emmener avec eux de quoi survivre, ne serait-ce qu’à court terme. Prisonniers d’une peur sans nom.
Ils ont fait des bonds de trois mètres en apprenant qu’elle arrivait et, ni une ni deux, se sont engouffrés dans leurs voitures pour mettre le plus de kilomètres possibles entre eux et elle.
Je n’aurais jamais cru que la simple évocation d’une femme puisse avoir un tel effet sur des foules entières. On dirait que la ville est en état de siège.
Ridicules. Voilà ce qu’ils sont tous. Les femmes ne m’ont jamais fait peur. Suis-je donc le seul véritable homme qui reste, alors même que je suis entouré de millions de mes semblables ? Où va-t-on, je vous le demande ?
C’est ainsi que me voilà emmitouflé dans une longue veste et le cou ceint d’une écharpe – il faut dire que le temps est plutôt pourri.
Le métro est fermé, l’aéroport aussi. Ni les bus ni les taxis ne circulent. Encore moins les voitures individuelles. Sauf pour fuir la ville. Fuyez donc, bande de lâches !
Moi, je m’en vais lui dire deux mots, à cette bougresse ! Pour qui se prend-elle, pour terroriser ainsi autant de monde ? On va voir ce qu’on va voir !
Je me rends sur les quais. Face à moi, l’océan. Un océan qui a l’air d’être de très méchante humeur. Je ne peux m’empêcher de sourire : un voilà un qui me ressemble pas mal, on dirait !
Bon. Reste désormais à savoir si elle va pointer le bout de son nez. Pour le moment, je suis seul. Elle ne va tout de même pas se dégonfler ? Ce serait le comble !
Le vent souffle décidément plutôt fort. Je relève mon col pour me protéger les oreilles. Alors, elle vient ? C’était bien la peine que tout le monde ait son nom sur les lèvres si elle se permet de nous faire faux bond ! J’ai pourtant entendu de mille bouches que c’est ici qu’elle arriverait.
Une vague s’écrase sous le quai, qui en tremble. Diantre ! Décidément vindicatif, cet océan. Et la femme fatale qui n’arrive toujours pas…
Je commence à me demander si c’était une bonne idée de venir en ces lieux. Le vent est désormais si violent que j’en ai mal aux oreilles.
Allons bon ! Qu’est-ce donc, là devant ? Voilà qui est… impressionnant. Les vagues se déchaînent au loin, lancées dans un improbable concours de saut en hauteur, que dis-je, de saut à la perche ! Toutes les nuances de gris se sont donnés rendez-vous dans le ciel. J’ignorais qu’il en existait autant.
Il me semble distinguer une forme floue au loin. Elle se rapproche et devient plus distincte. Plus imposante, aussi. L’air tourne sur lui-même, colossal mixeur devenu fou. Une tempête. La reine des tempêtes, même. En voir à la télévision est une chose, mais se retrouver face à face avec un tel monstre en est une toute autre. Je mesure à quel point je ne suis rien, grain de poussière à la merci des éléments déchaînés. Comment peut-on survivre à une telle rencontre ?
Rencontre ?
Oh, non ! Ce pourrait-il que… ? Me serais-je fourvoyé depuis le début ? Mon regard balaye les quais. Elle n’est pas toujours pas arrivée. Sauf si… Sauf si je me suis trompé. Sauf si en fait, je suis en train de lui faire face, qu’elle est effectivement en train d’approcher. De l’océan. En tournant sur elle-même à une vitesse folle.
Voilà qui expliquerait beaucoup de choses. Autour de moi, les quais tremblent. Les lattes de bois les composant se mettent à se disjoindre, à se tordre, à se déchirer. Je ne vais garder mon équilibre bien longtemps.
Et j’en suis désormais persuadé : cette Sandy dont tout le monde me rabattait les oreilles n’est finalement pas la pire des mégères à laquelle je m’attendais. Mais quelle idée, aussi, de donner des noms de femmes à des tempêtes ?
Ne reste plus qu’une constatation : pour moi, nul abri. Nulle échappatoire.
Commentaires
en fait tu gardes juste le S majuscule...arrêtes de parler de moi de cette façon s'est trop proche de la vérité.(je glousse sous ma cape hihihihi)
Faut croire que ça devait être prémonitoire :)